Jérémy Tarian

Jérémy Tarian

Créateur de la marque de lunettes Tarian

17 juin 2016

Paris

Jérémy Tarian est un parisien à l'âme voyageuse. Petit, il grandit tout près du Jardin des Plantes puis dans le premier arrondissement de la capitale, avant de s'installer à Berlin et New-York, pour finalement lancer son originale et élégante marque de lunettes à Paris, dès son retour en 2012. Rencontre avec ce passionné de couleurs et de belles matières, entre son tout nouvel appartement niché dans le quartier populaire de Château d'Eau et son atelier, à l'abri d'une ruelle dans le Haut Marais...

Dans le salon, devant le canapé Ligne Roset, table noire de Studio Pool pour Petite Friture et table blanche signée HAY. Le long du mur trône un USM Haller jaune et blanc, accueillant la lampe de Javier Mariscal pour Artemide.

Un peu partout dans l'appartement, on retrouve les céramiques colorées imaginées par Jérémy Tarian à partir de différentes terres mêlées.

Jérémy, vous avez un attachement tout particulier pour la rue Dupetit Thouars ?

Oui, à mon retour sur Paris, je me suis installé dans un petit studio qui me servait également d'atelier, au 12, rue Dupetit Thouars, dans le 3ème arrondissement de Paris. Puis, ma marque s'est développée, et j'ai réussi à avoir un vrai atelier, toujours dans ce même immeuble. Depuis peu, j'ai déménagé dans le 10ème arrondissement.

Qu’est-ce qui vous plaît dans votre nouveau quartier ?

Ici, tout est extrêmement mélangé. Mon immeuble est plutôt bourgeois, mes voisins là depuis très longtemps. Mais il suffit de faire trente mètres dans un sens ou dans l'autre pour opérer un changement de cadre total. J'aime ce mélange, cette vie de quartier.

Déjà de petites habitudes ?

Pour l'instant, ce sont surtout des habitudes alimentaires (il sourit). Je suis d'origine arménienne, il y a la grande épicerie arménienne de Paris rue Lamartine, des petits restaurants marocains, le syrien juste en face... Le choix est impressionnant.

“On retrouve ces mélanges de couleurs jusque dans les meubles USM que j'ai choisi bicolores. J'aime l'idée d'avoir des bandes horizontales colorées.”

Il y a cent ans, la cour de votre atelier hébergeait de nombreux artisans. Qui sont vos voisins désormais ?

C'est très varié. Juste à gauche, on trouve un institut de massage, à droite, des architectes, il y a aussi deux rédactions de magazines, l'association d'un festival de musique classique, ou encore une dame qui fait de la céramique japonaise... Je fais d'ailleurs beaucoup de céramique.

Ah bon ?

Oui, je me rend à un atelier de céramique deux-trois fois par semaine. Quand j'étais petit, je faisais beaucoup de poterie, j'aimais beaucoup ça. Aujourd’hui dans la création de lunettes, nous travaillons beaucoup les matières, et notamment l'acétate pour créer nos propres coloris. C'est un peu ce que je reproduis avec la céramique et les mélanges de terres...

D'ailleurs, comment élaborez-vous vos prototypes ?

Je fais tous les premiers croquis à la main, puis mon assistante les reproduit sur ordinateur. On réalise nos plaques d'acétate à partir de copeaux de matières près de Milan, en Italie, qu'on remet sous presse pour arriver à des coloris uniques produits en petites séries. Les plaques sont ensuite envoyées dans une usine Jurassienne qui réalise les premiers prototypes, tout à la main.

Quand avez-vous créé votre marque éponyme ?

Tarian est né en 2012, ça passe tellement vite ! Quand je suis revenu sur Paris, je travaillais chez ma mère, j'avais investi son salon, c'était mon stock (rires). Petit à petit, on a grandi et on s'est professionnalisé. Pour moi, la première chose importante était l'image de marque, le but étant de trouver quelque chose de légèrement décalé, afin de faire parler de nous sur de simples photos, de trouver un autre angle et de questionner un peu les gens... Depuis le début, c'est la photographe Kate Fichard qui réalise nos images.

Si vous deviez définir Tarian en trois mots ?

Je dirais authentique pour la production artisanale ; contemporaine pour l'image de marque et... très sympathique ! (rires)

“Autour de moi, il faut que tout soit zen, rangé, c'est peut-être mon côté Suisse...”

Dans l'atelier de Jérémy Tarian, le grand USM Haller noir sert de présentoir aux différentes montures.

Votre père, Alain Mikli, avait également sa marque de lunettes. C’est lui qui vous a transmis cette passion pour l’artisanat, le sens du détail, les belles matières ?

Mon père a eu sa marque pendant trente ans. J'ai toujours été proche de ses équipes, mais nous n'avons jamais travaillé ensemble. Il n'était pas dans une démarche de transmission, mais c'est aussi ce qui a fait que je me suis rapproché de ce milieu finalement. A la base, je suis parti à Berlin pour apprendre l'allemand car je faisais une école de finance de marché, un peu éloigné du monde de la lunette ! Mais il se trouve que j'ai trouvé un stage de comptabilité par hasard, chez le lunetier IC! Berlin juste en face de chez moi. La compta, c'était pas franchement rigolo, et en allemand, encore moins ! (rires) Ca a duré deux semaines et petit à petit, j'ai été intégré à l'équipe de création. J'y suis resté deux ans, c'était extraordinaire. Puis, je suis parti à New-York pour faire une école de design graphique et j'ai commencé à travailler dans des boutiques de lunettes. Ca m'a beaucoup plu, j'étais prêt à monter ma petite affaire. J'ai décidé de revenir sur Paris pour plein de raisons, notamment le « fait en France à la main ». C'était important d'être le plus prêt possible du lieu de production.

Vous fabriquez 500 paires par modèle, toutes numérotées, que vous appelez « limited eye-dition ». Pourquoi produire uniquement des éditions limitées ?

Cela fait vraiment partie de l'ADN de la marque. Par rapport à la production d'une part, car nous faisons nos propres coloris et de toutes petites séries. Mais surtout parce que pour la moitié de la collection, ce ne sont que des matières qui ont vingt, voire trente ans. Il y a tout un travail de chine de vieux acétates qu'on refaçonne en y collant d'autres matières, et parfois nous n'en sortons que trente ou quarante paires. Le but est d'arriver à des coloris uniques et personnalisés.

D’où tirez-vous votre inspiration ?

De la couleur avant tout. Même dans la conception d'une monture, c'est la couleur qui va déterminer sa forme. La lumière aussi est importante, nous avons beaucoup de montures pour lesquelles nous ajoutons de la transparence derrière les couleurs, afin qu'elles prennent du relief.

D'où vous vient ce goût pour la décoration ?

C'est avant tout dû à la manière dont je travaille. Autour de moi, il faut que tout soit zen, rangé, c'est peut-être mon côté Suisse (rires). Je vis dans un très vieil immeuble avec parquet d'origine, cheminée, vieux volets intérieurs... D'un côté, je voulais préserver ces éléments et de l'autre, donner une petite touche contemporaine, ne serait-ce que par l'agencement : une cuisine mi-ouverte mi-fermée, l'absence de porte pour avoir une vraie circulation, un mélange d'authentique et de contemporain...

Un peu comme votre label finalement...

Oui, c'est vrai (il sourit). D'ailleurs, on retrouve ici aussi ces mélanges de couleurs, jusque dans les meubles USM que j'ai choisi bicolores. J'aime l'idée d'avoir des bandes horizontales colorées, à l'image du meuble USM de la salle-à-manger, bleu-gris-bleu. Comme une toile blanche, j'aime les bases neutres auxquelles viennent s'ajouter de petites touches de couleurs.

Qu'est-ce que vous y stockez ?

J'ai deux meubles USM dans mon appartement que j'utilise comme vaisselier, tiroirs à lunettes, bibliothèque ou placard à chaussures. Ils sont vraiment multi-usages.

“C'est un meuble qui a grandit avec nous, qu'on a même emmené sur des salons. On l'a modifié au fur et à mesure, agrandi, on y a ajouté des éléments...”

Vous en avez également d'autres dans votre atelier...

Oui, j'ai notamment un grand meuble de présentation que j'ai acheté pour les besoins de ma marque. C'est un meuble qui a grandit avec nous, qu'on a même emmené sur des salons. On l'a modifié au fur et à mesure, agrandi, on y a ajouté des éléments. Tout comme ceux qui sont chez moi aujourd'hui, ce sont des meubles que j'ai reconfiguré, adapté à mes besoins.

Comment avez-vous connu la marque ?

Je m'occupe de deux workshops par an à la HEAD (Haute Ecole d'Art et de Design) de Genève, et comme beaucoup d'écoles Suisses, ils sont très bien équipés en USM ! Dès mes premiers workshops, il y avait tous ces meubles autour de moi que j'aimais beaucoup, puis j'ai vu qu'ils étaient aussi présents sur Paris. J'ai poussé la porte d'une boutique en 2012, et ça a été une révélation...

Parlez-moi de ces workshop que vous animez à la HEAD...

J'ai créé depuis peu les collaborations Tarian+. Pour la première édition, la monture a été réalisée par des étudiants de la HEAD de A à Z. L'idée ? J'arrive avec une plaque d'acétate, un sujet, et eux réalisent une lunette tout à la main. On leur demande même d'aller jusqu'au bout et de proposer des images de campagne. On arrive à des résultats superbes...

Nous remercions chaleureusement Jérémy Tarian pour son agréable accueil dans son magnifique appartement baigné de lumière et son atelier inspirant. Un grand merci pour son hospitalité, sa sérénité et sa bonne humeur contagieuse.

Ce portrait a été produit par le magazine international Freunde von Freunden. Cliquez ici pour découvrir tous les meubles USM pour votre maison et votre bureau.