Oliver Holy

Oliver Holy

PDG, Classicon

11 janvier 2016

Munich

C'est dans l'impressionnant siège social de München-Riem que nous rencontrons le jovial Oliver Holy, fils de l'entrepreneur Jochen Holy et arrière-petit-fils du pionnier du textile Hugo Boss, l'homme derrière le succès du fabricant de meubles Classicon. Dans son bureau, dont la superbement grande baie vitrée permet une vue dégagée sur la nature, nous parlons de la ville de design qu'est Munich, de Konstantin Grcic et de la passion d'Holy pour Schwabing.

En fait, vous avez fait des études de droit. Comment cela s'accorde-t-il avec votre amour du design ?

J’ai atterri par hasard dans le droit. À l'origine, je voulais étudier le design. Mais, même si tu as vraiment du succès en tant que designer, au final c'est une entreprise qui décide si elle réalise une ébauche ou non. Finalement, les études de droit ont été la meilleure chose qui pouvait m'arriver. Cela m'a permis une toute nouvelle vision des choses.

En 1998, votre père Jochen Holy a repris Classicon. Vous avez rejoint l'entreprise peu de temps après.

Exactement, c'était peu avant ma maîtrise, alors que je savais déjà que juriste n'était pas le métier de mes rêves. Mon père m'a conseillé de terminer mes études malgré tout. Il pensait que je pourrais toujours intégrer l'entreprise après ma deuxième maîtrise. J'ai laissé passer une nuit puis j'ai pris la décision d'arrêter mes études de droit. Je savais tout simplement qu'intégrer tout de suite Classicon était exactement ce que je voulais faire.

À 8 ans, Oliver Holy a demandé pour la première fois de l'art comme cadeau de Noël. Ses premiers cadeaux étaient des photographies de Nan Goldin.

Comment se sont passés les débuts ?

Mon père m'avait clairement dit que je devais faire mes preuves. Évidemment, au début je n'étais pas PDG, je n'étais rien. J'ai tout fait : j'ai été à la comptabilité, dans le service interne, à la conception des produits, aux achats, sur la route avec les représentants, dans l'entrepôt, même si ce n'est pas simple pour ceux qui comme moi sont en fauteuil roulant. Mon père a toujours dit que je devais savoir comment tout cela fonctionnait. Là-bas, ils en connaissaient plus sur l'entreprise qu'à l'étage de la direction.

Puis en 2003, vous êtes devenu PDG.

C'était après l'effondrement de la New Economy, une période difficile. Mais je crois que c'est mieux de d'abord devoir lutter que d'arriver quand tout marche à merveille. Dans ce cas, ça ne peut que s'améliorer.

Quelles sont les compétences les plus importantes à votre poste ?

Garder les yeux ouverts, prendre du plaisir à faire ce que l'on fait. Les préjugés sont la pire chose. Une certaine prudence. Je ne ferais jamais quelque chose juste pour le succès commercial. Ce serait comme me vendre. Vous voyez, on attend de moi que je conçoive les classiques de demain. Mais je ne peux pas montrer cinq classiques à Cologne et cinq à Milan. On crée au maximum deux ou trois classiques par an. Et encore, je compte tous les fabricants de meubles comme Vitra ou Moroso. Je veux créer un produit qui dure au moins dix ans. On apprécie que Classicon ne lance pas un produit sur le marché avec trop de précipitation. Mais c'est peut-être vraiment dû à ma prudence souabe.

En 2002 vous avez déménagé dans l'actuel et spectaculaire siège à München-Riem. Le critique d'architecture Gerhard Matzig a qualifié le bâtiment de « paquebot de luxe ayant atterri sur un champ ». Qu'est-ce qui a changé sur le nouveau site ?

Peu à peu, nous avons occupé de nouveaux domaines, avons modifié toute notre corporate identity et avons pris une nouvelle agence à Munich. Nous avons conçu des expositions avec Konstantin Grcic et Eileen Gray. Il y a eu des projets avec Alfred Häberli, une propre plaquette avec Grcic. Pour résumer : nous sommes devenus plus internationaux.

Vous évoquez l'économie créative. Comment jugez-vous Munich à cet égard ?

Munich n'est certainement pas le centre de la créativité mais c'est une ville très agréable dans laquelle on a besoin de plus de temps pour tout. Ce n'est pas plus mal car quand une chose va de travers, on ne tombe pas de si haut. Nous avons de très bonnes galeries et des musées magnifiques, un parfait mélange de cultures entre l'ancien et le moderne, comme les pinacothèques. De nombreuses plateformes Internet se trouvent à Munich mais aussi des acteurs mondiaux comme Siemens et BMW qui investissent dans les nouvelles technologies et ont besoin de personnes créatives. On trouve tout à Munich, mais c'est plus calme.

Trop paisible pour le site de Classicon ?

En aucun cas, car le site de Munich n'est pas le seul facteur déterminant pour nous puisque Classicon est présent dans 53 pays. D'ici, nous pouvons prendre un vol vers n'importe quelle destination. Mais nous avons évidemment de bons distributeurs sur place.

Chez Classicon, les postes de travail sont séparés par des étagères USM Haller. Debout, on voit la grande pièce dans son ensemble, mais assis, on remarque qu'il s'agit de nombreuses petites pièces.

Y a-t-il cependant quelque chose qui vous manque à Munich ?

Le côté international qui fait la richesse de Berlin. À Berlin, on parle souvent anglais, de jeunes galeries poussent partout comme des champignons. Mais il y a une chose qu'on oublie toujours et qui oblige quelques grandes galeries à quitter Berlin : le manque d'argent. Berlin est une ville pauvre. À Munich, les clients des galeries capables de dépenser plus de 100 000 euros ne sont pas rares. Aujourd'hui, ce n'est plus si difficile dans le domaine de l'art. Quand un Graubner ou un Gursky est proposé à Berlin, les acheteurs viennent souvent de Munich.

Voyez-vous d'autres différences en dehors du pouvoir d'achat ?

À Berlin, les gens font plus la fête et se célèbrent eux-mêmes. À Munich, le côté réservé de l'Allemand du Sud domine, fidèle à la devise : je n'ai pas besoin de raconter à tout le monde ce que je fais. Ici, la logique de la sécurité domine. J'aime Berlin et je trouve cette ville géniale mais je ne souhaite pas y vivre, même si j'ai pensé à louer un appartement car j'y ai de nombreux amis. Mais je ne l'ai pas fait car je suis de toute façon toujours en déplacement. Je ne savais vraiment pas comment m'organiser. En outre, j'aime passer mes week-ends au Tegernsee.

“Je veux créer un produit qui dure au moins dix ans.”

Quelle ville internationale vous inspire ?

New York est une ville insensée qui vit à une allure incroyable. J'en reviens toujours avec de nouvelles idées. J'apprécie la mentalité américaine.

Pourquoi ?

Quand les Américains chutent, ils se relèvent aussitôt et essaient quelque chose de nouveau. Les Allemands sont plus prudents. En Amérique personne ne te regarde de travers en cas d'échec. Aux États-Unis, voilà ce qu'on se dit : « Hé, je me relève, je marche la tête haute et je développe une nouvelle idée. » Là-bas, quand quelqu'un conduit une grosse voiture, tout le monde dit : « Ouah, il a du succès, il a réussi. » En Allemagne, c'est plutôt : « Il ne paie pas assez d'impôts. » C'est pour cela que les Allemands hésitent à afficher leurs compétences en public.

Chez Classicon aucun produit n'est mis sur le marché trop rapidement. Cela est en partie dû à la prudence de Souabe d'Oliver.

“Je ne ferais jamais quelque chose juste pour le succès commercial.”

Parlons de design. Comment jugez-vous la scène munichoise ?

Elle est très vivante. Konstantin Grcic, Stefan Diez et suffisamment d'autres designers vivent à Munich. Je ne connais actuellement aucun jeune designer qui soit excellent et basé à Berlin. Bien entendu, Werner Aisslinger est à Berlin.

Konstantin Grcic conçoit aussi des meubles pour Classicon. Quelle est son importance pour vous ?

C'est mon designer préféré. Je me sens bien avec ses formes et ses matières. La collaboration avec lui est un véritable plaisir. Et je l'apprécie en tant que personne. Cela vaut aussi pour Sebastian Herkner. Nous nous rencontrons régulièrement et reprenons toujours le fil là où nous nous l'avions laissé.

En plus du design, l'art est aussi l'une de vos grandes passions. Comment cela a commencé ?

Très tôt. Déjà à 18 ans, je disais à mes parents que je voulais de l'art pour Noël ou mon anniversaire. Les premiers cadeaux dont je me souviens étaient des photographies de Nan Goldin. À l'époque, ses œuvres n'étaient pas aussi chères qu'aujourd'hui. Au début, j'étais fortement intéressé par la photographie. Depuis quelques années, mon envie a diminué. La photographie est devenue tellement quelconque. Tout le monde s'y essaie depuis qu'il y a des appareils numériques. Alors qu'une image peinte n'existe qu'une seule fois. Le peintre y a investi plus de temps. Ça me plaît. Désormais j'aime aussi beaucoup acheter des objets. Avant, je n'aurais jamais pu imaginer cela. J'apprécie particulièrement le travail de jeunes artistes. Pour moi, le nom n'est pas tellement important. Cela doit me plaire car je vis avec ces sculptures. Bien entendu, des artistes tels que Cy Twombly et John Chamberlain restent pour moi inégalés.

À une époque l'empire Boss appartenait à votre famille. Personnellement, quelle mode vous enthousiasme ?

En ce qui concerne la qualité, je ne fais aucun compromis, ni dans mon entreprise, ni pour mes vêtements. Quand je m'achète un pull-over en cachemire, il s'agit de cachemire véritable. Lorsque je me rends dans la boutique d'Andreas Murkudis à Berlin, je ne repars jamais les mains vides. Nike fait régulièrement de super éditions.

Dans votre bureau, le design minimaliste et élégant des meubles USM Haller saute particulièrement aux yeux. Qu'est-ce que vous appréciez chez cette marque ?

Son incroyable stabilité à la revente. Les éléments sont pratiques et astucieux et pour moi ce sont les plus beaux meubles qui existent. Ils ne se trouveraient pas dans mon bureau s'ils ne me plaisaient pas. Je passe neuf heures par jour dans cette pièce. Il est donc important pour moi de m'entourer de choses esthétiques. Dieu merci, j'ai le luxe de pouvoir choisir mon bureau. Ce que vous voyez représente à 100% ma personnalité.

Quels meubles USM possédez-vous ?

Chez Classicon, mon bureau ainsi que ceux de mes collaborateurs sont entièrement aménagés avec des meubles hauts et bas d'USM Haller. Nous avons été intransigeants sur ce point.

Depuis combien de temps possédez-vous vos meubles USM Haller ?

Certaines pièces ont presque 30 ans. Mais il m'est impossible de dire ce meuble a 30 ans et celui-là en a que cinq. En effet, nous en avons continuellement acheté davantage.

Vous avez certainement déménagé avec quelquefois, non ?

Oui, plusieurs car ils étaient déjà présents dans notre ancien site. À chaque fois que nous avons déménagé, désassemblé les meubles, nous avons rajouté un élément.

Des souvenirs vous relient-ils à la marque ?

Oui car j'ai réellement grandi avec elle. À la fin des années 70, mon père a décidé d'aménager l'intégralité de son entreprise avec USM Haller. C'était l'une des plus grosses commandes à l'époque. Encore aujourd'hui, ces meubles sont de fidèles compagnons.

Quels sont les effets bénéfiques des meubles sur l'aménagement de vos bureaux ?

L'interaction entre des espaces de tailles différentes a un effet très positif sur l'aspect général. Nous avons un grand bureau ouvert et nous séparons les postes de travail avec les étagères USM Haller. Debout, on voit notre bureau comme une grande pièce. Mais assis, on remarque que, tiens, il y a de nombreuses petites pièces dans une grande. Et il y a encore un avantage : quand je suis assis, j'ai une barrière dans le dos qui fait écran.

Quels objets conservez-vous dans vos meubles ?

De très nombreuses choses. Comme par exemple mon ancienne chaîne-hifi Braun, au design si magnifique. Ou mes livres. J'ai rangé des dossiers dans les compartiments fermés. Sur la surface je fixe des invitations et des cartes avec des aimants.

Changez-vous la disposition parfois ?

Oui, constamment. Depuis quelques semaines, j'ai suspendu ici une très belle carte de ma belle-sœur avec une illustration. À côté se trouvent des invitations à des vernissages ou à une fête au Château Marmont ou à un événement au Sotheby's. J'aime particulièrement le panneau avec la phrase d'Andy Warhol « All is pretty », offert par Interview Magazine. Mais la photo de ma Mustang s'accorde aussi parfaitement.

Avez-vous des préférences concernant les couleurs ?

Oui, le noir, comme on peut facilement le voir, car il fait beaucoup mieux ressortir les objets que je conserve dans les casiers. Tout bien réfléchi, les meubles USM sont presque les seuls éléments noirs que je possède. De même, les vêtements noirs sont rares dans mon dressing. Les Italiens choisissent toujours un bleu très foncé mais jamais du noir. Et ce n'est pas pour rien qu'ils passent pour les personnes les mieux habillées du monde.

Et à quoi ressemble une journée ordinaire chez vous ?

Elle commence le matin par une tentative de faire du sport. Et en été, ça marche. De manière générale, je suis évidemment très occupé par les affaires quotidiennes dans l'entreprise. Mais je travaille aussi constamment avec les développeurs de produits et les fabricants. Toutes les activités convergent vers moi, ce qui me plaît. Je voyage énormément, prochainement je me rendrais au salon du meuble de Milan, puis à New York pour l'International Contemporary Furniture Fair, ensuite je vais chez un distributeur au Japon avant d'aller à Shanghai. Entre-temps, je serai aussi à Paris et Londres.

Une dernière question : puisque vous voyagez autant à travers le monde, y a-t-il quelque chose qui vous manque parfois à München-Riem ?

Prendre le déjeuner en ville me manque. Cela prend un quart d'heure d'aller en centre-ville en voiture. Je m'étais promis de le faire au moins une fois par semaine mais la réalité est malheureusement très différente. Peut-être que je devrais m'accorder plus de temps pour le faire.

Nous remercions Oliver Holy qui, pendant une matinée, nous a accordé un aperçu du monde extraordinaire de Classicon.

Ce portrait a été produit par le magazine international Freunde von Freunden. Cliquez ici pour découvrir tous les meubles USM pour votre maison et votre bureau.