Julius Kranefuss

Julius Kranefuss

Architecte

4 avril 2016

Kreuzberg & Neukölln, Berlin

L’enthousiasme de Julius Kranefuss pour son travail va de pair avec celui qu’il éprouve pour sa vie. C’est le genre de personne qui ne s’octroie jamais de pause – qu’il soit à fond sur un projet pour son bureau d’architecture ZWEIDREI, qu’il recueille de l’argent pour les jeunes défavorisés ou lorsqu’il rencontre des artistes en herbe. Nous lui avons rendu visite sur son lieu de travail à Berlin où il nous a dévoilé ses projets en cours – et où il nous a raconté comment, par un pur hasard, il a découvert le mobilier d’USM.

Julius, ton entreprise ZWEIDREI fait de l’architecture médiatique. Qu'est-ce que c'est exactement ?

La notion d’architecture médiatique devait à l’origine élargir le terme classique d’architecture. L’idée n’est pas nouvelle ; elle date du début du 20e siècle mais est réellement devenue populaire dans les années 70 quand on a commencé à réfléchir à la manière de mieux coordonner la vie en société. Comment peut-on, grâce à l’architecture, créer des espaces sociaux et des identités urbaines ? Il n’était plus question de pratiquer l’architecture, mais plutôt de la considérer et de la comprendre au sens large du terme.

On parlait alors d’architecture médiatique quand l’architecture était associée à des technologies modernes. Cela a été rapidement banalisé et la notion ne revenait sur le tapis que lorsqu’on évoquait les façades lumineuses et des compositions utilisant des LED. Mais au fond, c’est une architecture qui intègre l’influence de la technologie sur l’être humain.

“Nous voulons trouver comment l’individu utilise à bon escient son environnement et quelles réactions on peut en attendre.”

Pourquoi est-ce que le terme d’architecture médiatique correspond à ZWEIDREI ?

Juste après notre diplôme universitaire, nous avons crée des installations avec des artistes et réalisé de nombreuses expérimentations sonores et visuelles. Je trouvais alors que la notion d’architecture médiatique correspondait bien. Mais l’année dernière, je me suis rendu compte nous voulions plutôt faire de l’architecture au sens premier du terme et que le terme d’architecture médiatique était pour beaucoup confus. C’est la raison pour laquelle nous nous appelons désormais ZWEIDREI Architekten, sans ajouter l’architecture médiatique.

Si on regarde l'ensemble de vos projets, on remarque leur diversité. Vous avez même conçu une table et une chaise.

Chez ZWEIDREI, nous essayons toujours de comprendre la signification de l’espace. Nous nous demandons par exemple : où se situent les frontières de l’architecture ? Dans ce cas précis, il était question de design spatial. Les choses dont on a besoin dans la vie quotidienne constituent pour moi des éléments qui structurent l’espace. Donc même une chaise ou une table. La notion de designer n’existe que parce quelqu’un a dit un jour : il faut faire une distinction claire entre designer produit et architecte. En fin de compte, il s’agit de l’utilisation de l’espace. Beaucoup de designers célèbres pensent aussi que la création de meubles est un travail architectonique considérable. Il s’agit de découvrir comment l’individu utilise à bon escient son environnement et quelles réactions on peut en attendre.

Es-tu à la fois designer et architecte ?

Non. Il y a tant de gens qui sont bien meilleurs designers que moi. Si un jour nous avons la chance de concevoir autre chose, nous serons heureux de pouvoir tenter une nouvelle expérience. Quant à savoir si notre design est réellement qualitatif je remettrai toujours cela en question. Il n'y a que comme ça que l’on apprend.
Il est très important de dire clairement que de tels projets – et tout le reste en architecture – ne sont jamais réalisés par une seule personne. Un culte de la personnalité, qui ne met en avant qu'un seul architecte, ne reflète que partiellement la réalité. Il ne serait pas juste de dire que ceci est ma table. Rien que cette table a exigé le travail de huit personnes, et sans mon équipe nous n’aurions jamais pu la faire. Pour moi, il est important que chaque contributeur soit cité. C'est comme ça qu'on s'amuse le plus.

À part vos propres modèles, vous avez aussi quelques meubles USM dans vos locaux.

Oui et l’histoire derrière est très belle. Le jour de la remise des clés de notre nouveau bureau, je me suis rendu avec mon cousin à notre ancien pour le vider. Sur place, il y avait, dans la cour, les meubles du studio qui se libérait à côté. Le propriétaire nous a demandé si nous pourrions en avoir l’utilité. Il tenait énormément à ses meubles, mais ne pouvait pas tous les garder. Il y avait vraiment des choses de belle qualité. Et nous avions un camion vide. Nous avons commencé à emballer des choses et tout à coup, j’ai découvert une petite table USM. Je me suis dit « c'est du délire » ! Puis nous avons eu le droit de jeter un œil dans les pièces du haut et là, il y avait encore plus de meubles et de tables USM.

Vous avez donc eu l’autorisation de tout prendre ?

Oui ! Au début, je n'étais pas à l’aise, mais l’ancien propriétaire était content que les meubles auxquels il attachait autant d’importance aient trouvé un nouveau chez-eux.

Le bureau était-il aussi celui d’un cabinet d’architecture ?

Non. Certes il y a pas mal de meubles USM aussi dans des cabinets d’architecture, mais grâce à l’esthétique fonctionnelle des meubles, ils conviennent partout. En plus, ils sont rapides et faciles à monter et sont livrés exactement dans les dimensions voulues. Une très bonne invention, à tous points de vue !

Aimerais-tu avoir plus de mobilier d’USM à l'avenir ?

Oui, absolument. Ces meubles sont robustes et ont une longue durée de vie, ils possèdent d’ores et déjà un statut de mobilier de bureau classique. Et ils fonctionnent tout aussi bien dans un environnement privé, tout particulièrement le buffet. Étant donné son intemporalité et sa versatilité, il peut être utilisé n’importe où. C’est d’ailleurs le meuble USM qui me plaît le plus.

Tu t’intéresses aussi beaucoup à l’art. D’où te vient cette passion ?

J’ai grandi dans une famille qui portait un vif intérêt à l’art, tout particulièrement à l’histoire de l’art. Nous allions dans tous les musées, par exemple pour regarder des fouilles archéologiques - je haïssais mes parents à cause de ça. De plus, nous partions toujours en vacances en voiture, faisant des centaines de kilomètres jusqu’en Italie, en Espagne ou en France. Le trajet était déjà suffisamment fatigant, mais en plus, on s'arrêtait tout le temps pour visiter des choses. Je trouvais ça plutôt débile. Mais avec du recul, je me rends compte que ça m’a permis de développer ma propre culture.

Quand est-ce que tu as commencé à apprécier une culture plus classique ?

Un jour, nous avons quitté l’autoroute pour aller au musée Bilbao de Frank Gehry. Il venait d’ouvrir. Frank Gehry est ensuite devenu pour moi l’union parfaite entre héros et architecte - tout à coup, tout cela me procurait un énorme plaisir. Cela m’a rapproché aussi un peu du choix de mes études : l’architecture. J’ai du moins commencé à percevoir l’art et l’architecture comme quelque chose de très présent en moi.

Tu travailles depuis des années avec l’organisation Round Table 5, une vente aux enchères d’art au bénéfice d'enfants et de jeunes. Cet engagement social, tu le dois aussi à ta famille ?

J’ai reçu une éducation très libérale. Ma famille est plutôt grande, avec de nombreux cousins, oncles et tantes. Dans une telle communauté, on apprend d'abord à faire attention aux autres. J’ai toujours attaché une grande importance à ma famille et cela m’a appris à avoir un regard positif sur la vie. Nous ne sommes pas seuls au monde.

Cette façon de penser influence tout particulièrement mon style architectural. J’ai grandi avec une conscience environnementale, avec l’idée du recyclage et de la fin de l’énergie nucléaire. Et j’essaie de faire les choses bien. Cela signifie aussi apprécier la valeur d'autres personnes. Je ne possède pas beaucoup, mais je peux quand même partager. Pour moi l'enjeu est rarement l'argent. C’est pour ça que je suis un très mauvais homme d’affaires.

En dernier lieu : y a t-il des projets de rêve que tu n’as pas encore pu réaliser ?

Cette liste est sans fin. Mais j’ai perdu l’habitude de m’imaginer tout le temps tout ce que l’on pourrait faire. Ce que nous faisons tous les jours c’est ce que nous aimons. Tout simplement. Nos propres possibilités sont tout aussi innombrables.

De plus, je suis particulièrement autocritique – par conséquent, tous nos projets restent un processus pendant lequel je me demande sans cesse ce qu'on aurait pu mieux faire. Aucune expérience ne peut être faite deux fois, tout comme il est impossible de lire un livre une deuxième fois en ressentant la même chose. Cette évolution est la belle herméneutique du savoir. Il faut également être prêt à commettre des erreurs.

Nous remercions Julius pour le temps qu’il nous a consacré et l’aperçu qu’il nous a donné de son bureau et de son travail.

Ce portrait a été produit par le magazine international Freunde von Freunden. On peut y trouver des informations supplémentaires sur son voisinage à Kreuzberg et son appartement, où des éléments d’aménagement faits main forment un beau contraste avec le quotidien numérique de son travail.

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